Dans bon nombre de pays africains, les paiements mobiles, les crédits numériques et la cryptomonnaie sont progressivement substitués aux cartes de paiement ainsi qu’aux agences bancaires. La finance digitale s’est fait une bonne place sur le continent depuis quelques années et continue de l’étendre davantage. En quelques clics sur un smartphone, il est désormais possible de payer des factures et faire des virements sans pour autant avoir un compte bancaire. Preuve de cet engouement : Le nombre d’entreprises de haute technologie du continent est passé de 301 en 2017 à 491 en 2019, selon le rapport Finnovating for Africa 2019 : Reimagining the African financial services landscape. Grâce aux nouvelles technologies, certaines villes du continent rivalisent désormais avec les places financières des pays avancés, et cela s’observe à travers l’émergence de Fintech à forte croissance à l’instar de Interswitch au Nigeria.
La technologie financière ou Fintech
La Fintech est le croisement entre les services financiers et la technologie. Elle décrit les nouvelles technologies qui visent à améliorer et à automatiser la fourniture et l’utilisation des services financiers.
Fondamentalement, la Fintech permet d’aider les entreprises, les propriétaires d’entreprises et les consommateurs à mieux gérer leurs opérations financières, à partir de logiciels et d’algorithmes spécialisés qui sont utilisés sur les ordinateurs et, de plus en plus, sur les smartphones.
Les offres de services financiers proposés par les Fintech sont principalement des services de paiement, d’investissement et de financement tels que les transferts d’argent, le dépôt d’un chèque avec un smartphone, le contournement d’une agence bancaire pour demander du crédit, la collecte de fonds pour le démarrage d’une entreprise ou la gestion d’investissements.
Un contexte favorable au développement des Fintech en Afrique
Selon Digitalizing Africa : the rise of Fintech Companies, rapport réalisé par PwC en partenariat avec Casablanca Finance City en 2016, l’essor des Fintech en Afrique est la conséquence de trois grandes tendances mondiales, en l’occurrence la révolution digitale, l’apparition d’une nouvelle classe de consommateurs avec des habitudes et des comportements évolués et la perte de confiance vis-à-vis des acteurs traditionnels de la finance, impulsée par l’impact de la crise financière mondiale.
Il faut souligner que l’Afrique est arriérée dans ce secteur, notamment à cause des difficultés concernant la formation qui a une évolution moins que proportionnelle à celle des technologies, ainsi que la rigidité des cadres règlementaires.
Cependant, la Fintech est le secteur qui attire le plus les investisseurs au sein de l’écosystème des start-ups en Afrique. Cela s’explique par les faibles taux de bancarisation ainsi que la forte pénétration du mobile (Selon un rapport du groupe Ericsson, le taux de pénétration du mobile en Afrique et au Moyen-Orient atteindra les 70% en 2024 contre 40% à la fin de 2018) et de l’Internet qui a une progression annuelle de 20%, soit 73 millions de nouveaux abonnés. Il faut également mentionner le niveau conséquent des fonds rapatriés sur le continent (avec 65 milliards de dollars de fonds envoyés chaque année par la diaspora africaine dans le pays d’origine) et la relative jeunesse de la population (le continent concentre la population la plus jeune au monde, avec une moyenne d’âge de 19 ans en 2019).
Notons par ailleurs l’intérêt croissant des organismes bancaires et des opérateurs téléphoniques, ainsi que les nombreux efforts des gouvernements africains pour soutenir l’émergence du secteur.
L’environnement du digital financier actuel
Aucun secteur ne présente le même potentiel en Afrique que l’espace Fintech lorsqu’il s’agit d’impact et de profits selon Tom Jackson, co-fondateur de Disrupt Africa.
Malgré son retard dans le secteur de la technologie financière, l’Afrique affiche des résultats surprenants, tel qu’indique le classement du Global Fintech Index 2020. Aujourd’hui, les hubs de la Fintech mondiale se situent aussi bien aux Etats Unis et au Brésil qu’en Afrique du Sud et au Kenya. En effet, quatre villes africaines figurent dans le top 100 du classement des villes les plus dynamiques en matière de Fintech, notamment Johannesburg qui occupe la 62ème place, suivie par Nairobi occupant la 63ème place, ainsi que Lagos et Le Cap qui occupent respectivement les 71ème et 87ème places du classement.
Une dynamique de développement basée sur 3 leviers
Pour favoriser le développement des Fintech, il serait judicieux pour les Etats africains de miser sur la formation de leurs populations jeunes et dynamiques, améliorer le climat des affaires en le rendant plus attrayant aux investisseurs et également faciliter l’accès au financement.
De prime abord, notons que les Fintech se développent en Afrique et la concurrence grandit pour attirer les personnes les plus qualifiées en matière de technologie. Afin d’accompagner cette ascension fulgurante des technologies financières, les Etats et les entreprises doivent favoriser la création de centres de formation avec un système éducatif valorisant l’innovation, l’esprit d’initiative ainsi que la créativité, limiter la fuite des cerveaux et encourager le retour au pays de leurs citoyens les plus brillants et expérimentés. Ensuite, les autorités publiques doivent jouer un rôle de « facilitateur » pour attirer des entreprises désireuses d’investir dans les start-ups. Elles doivent également favoriser le développement de leurs entrepreneurs à travers un environnement attractif pour les investisseurs et en minimisant les entraves à l’investissement. Enfin, il faut favoriser l’investissement qui est un élément essentiel pour le développement des Fintech africaines. Cela passe au préalable par une sensibilisation autour de l’importance de l’écosystème des Fintech pour l’économie, ainsi qu’une exhortation des acteurs du système financier à répondre aux besoins des start-ups africaines et à envisager leurs perspectives et stratégies d’expansion.